Rencontre avec David Roussier, directeur général de la distillerie Armorik (ou distillerie Warenghem, du nom de son fondateur). Le leader actuel du whisky français a collaboré avec la Maison Benjamin Kuentz à la création de son troisième whisky Le Guip.
Maison Benjamin Kuentz : Pour commencer, quelques mots sur la distillerie Armorik que vous dirigez ?
David Roussier : C’est une distillerie familiale qui a plus de cent ans. Elle opérait plutôt dans les liqueurs de fruits et de plantes à l’origine. Nous avons commencé à faire des whiskies à la distillerie dans les années 80 pour nous diversifier un peu. Nous avions déjà ouvert notre distillerie au chouchen dont nous produisons toujours la marque la plus vendue en France aujourd’hui. Puis, naturellement, le whisky s’est imposé dans nos autres choix de diversification car après tout la France est un marché important pour ce spiritueux. Et quelle région plus que la Bretagne est légitime pour travailler ce spiritueux qui est la chasse gardée de nos grands-cousins celtes ? Nous avons démarré avec un blend comme le voulait la tendance de l’époque puis lancé, en 1998, un Single Malt, l’Armorik, qui est aussi l’autre nom de notre distillerie.
Maison Benjamin Kuentz : Pouvez-vous nous raconter votre rencontre avec la Maison Benjamin Kuentz ?
David Roussier : Benjamin Kuentz est venu me parler de son projet de whisky français. A l’évidence, il y a entre nous une proximité générationnelle mais plus que ça. On a la même vision du métier et du business. Et puis l’attachement de Benjamin pour la Bretagne et les envies qu’il poursuit autour de ce terroir m’ont évidemment bien plu. Nous avons tous été sensibles à son désir de faire un whisky avec sincérité, je veux dire qu’il manifeste un vrai intérêt pour le produit, et puis il a cette volonté d’innover qui est très revigorante.
Maison Benjamin Kuentz : Et la collaboration autour du Whisky Le Guip ?
David Roussier : Pour tout vous avouer, ce projet était un peu tendu compte tenu de l’état de nos stocks (nous, les distilleries, sommes tributaires de ce qui se trouve dans nos chais). Mais le projet de la Maison Benjamin Kuentz nous plaisait, donc on a libéré un peu de réserve. La sélection fut ardue car nous avons plutôt l’habitude de créer des whiskies ronds et fruités. Benjamin Kuentz voulait, pour Le Guip, un esprit plutôt sec et charpenté. C’est en fait un whisky du Finistère qu’il avait en tête, celui de la Lande et de terres plus arides quand nous produisons plutôt des whiskies des Côtes d’Armor, aux évocations plus riches de pommes, de granit rose et de fruits doux. Il y a vraiment plusieurs terroirs en Bretagne.
Maison Benjamin Kuentz : Qu’est-ce qu’un whisky breton en fait ?
David Roussier : L’idée d’origine nous importe beaucoup. Le fait de faire vieillir nos whiskies dans des fûts en bois de la région et l’influence du climat breton dans ce processus marquent très clairement le tempérament de nos whiskies. Aujourd’hui, il existe 5 ou 6 distilleries en Bretagne et notre travail est encadré par un cahier des charges strict qui permet de faire valoir véritablement une identité de whisky breton.
Maison Benjamin Kuentz : Et enfin, qu’est-ce qui, selon vous, caractérise le savoir-faire de la distillerie Armorik ?
David Roussier : Je crois qu’au-delà de cette identité bretonne, nous sommes très attachés au sein de la distillerie Armorik à l’intervention de l’humain à toutes les étapes de fabrication de nos whiskies. Et en cela je peux dire qu’on est à contre-courant de ce qui se pratique. Car la tendance est très clairement à l’automatisation. Je crois que c’est une des dimensions qui a retenu l’intérêt de la Maison Benjamin Kuentz.